Comme l'a écrit Philippe Casimir, historien, maire de la commune de 1912 à 1925, qui a consacré sa vie à la restauration du Trophée, " la montagne de La Turbie d'où la vue porte sur de larges étendues vers l'Italie et la France, la Méditerranée jusqu'à la Corse, est plus féconde en histoire qu'elle ne comprend d'espace dans son immense panorama."

Il y a plus de 3000 ans, un peuplement ligure était établi près de la côte occupant le massif de l'Agel. Au dixième siècle avant notre ère les navigateurs Phéniciens, au cours de leurs explorations sur les pourtours de la Méditerrannée découvraient à leur tour la montagne de l'Agel.

Ils accostaient au port de Monaco, et firent partir d'ici les voies de communication dites, par la suite, "Voies Héracléennes", reprenant les premières pistes ligures.
Puis arrivèrent les Celtes.
Nous pouvons donc supposer, qu'aux siècles qui précédèrent l'arrivée des Romains, le territoire qui nous intéresse était occupé par un fond de population d'origine celto-ligure comme l'attestent les diverses constructions en gros blocs de pierre, oppidums ou "castellaras".

( le Casteou au lieu-dit le Gayan, au mont des Mules au-dessus de Beausoleil, au quartier des Révoires en limite de La Turbie/Monaco)

Pendant la période romaine, le grand César utilisera l'embarquadère de Monaco et établiera son camp des légions avant d'aller livrer la bataille de Pharsale,( en -49, -48),au plateau observatoire de la Tête de Chien.
La véritable période romaine commencera avec l'arrivée de la Via Julia en -13 et l'érection du célèbre Trophée d'Auguste, des Alpes, en -7/-6 pour commémorer les victoires d'Octave- Auguste sur 45 peuplades alpines ou ligures.
Sur l'itinéraire d'Antonin, ce point, où finit l'Italie et commence la Gaulle, est désigné par "Alpe Summa
Après la chute de l'empire romain, le passage destructeur des Wisigoths, des Lombards, puis des Sarrasins, le nom de LA TURBIA, apparait pour la première fois dans un document daté de 1078. Ce nom étant une déformation de "Turris Viae", la Tour sur la voie.
De 1125 à 1325, la ruine du Trophée, tour ruinée, transformée, habillée en forteresse, et les bâtisses élevées à partir des matériaux dudit monument défiguré, formeront le "Castro Torbia", bastion et refuge sur la route de Gênes en Provence des comtes catalans et des rois angevins.
C'est la première période de la seigneurie de La Turbie avec la formation de "l'Université" des chefs de famille de la Communauté. Le roi Robert, comte de Provence, en 1332 deviendra seigneur par acquisition, rattachant ainsi directement au domaine comtal la seigneurie de La Turbie.
Après la Dédition niçoise de 1388, La Turbie sera place forte des "Estats de Savoye" avec un gouverneur jusqu'au démantèlement du Trophée devenu forteresse en 1705, au cours de la guerre de la succession d'Espagne pendant les péripéties de laquelle La Turbie, par la volonté du roi de France Louis XIV, fut rattachée à la Principauté de Monaco jusqu’à la paix d’Utrceh en 1713.
Puis, au milieu du XVIIIème siècle, au cours de la guerre de la succession d'Autriche, la Communauté aura à subir les charges du camp gallispan établi en ce lieu de 1745 à 1748.
Les accords de 1760 signés entre le roi de Sardaigne, duc de Savoie, et le Prince de Monaco, suivis d’une Transaction en 1761, devaient enfin mettre fin à la longue querelle des limites entre les deux communautés de Monaco et de La Turbie, portant sur des contestations territoriales depuis le début du XIII ème siècle.
Cette même Communauté, en se servant des blocs de la ruine du fort démantelé en 1705, édifiera de ses mains, de 1764 à 1777, la nouvelle église Saint-Michel.
Puis la communauté verra passer les troupes de l'Armée d'Italie, en subissant toutes les servitudes, pendant la période de la Révolution française de 1792 à 1800, avant l'établissement de l'Empire français de Napoléon et le retour à la stabilité.
En 1814, ce sera la période dite de la Restauration sarde, avec le retour de la maison de Savoie en comté de Nice.
Au recensement de 1846, la Communauté comprend 227 familles et 876 habitants; la majorité étant des laboureurs vivant des produits de la terre.
 La ressource principale provient de la magnifique oliveraie qui s'étend sur quelques 200 hectares et produit, aux bonnes années, 20000 rups d'huile comestible. ( 1 rup = 8 kg); les autres productions étant les céréales, les figues et autres fruits et le vin provenant des vignes plantées sur les pentes des collines.
Parallèlement, comme en de nombreuses communautés rurales du comté de Nice, depuis les origines seigneuriales au XIIème siècle, le pacage sur les terres incultes assurait une activité pastorale pouvant accueillir 1200 têtes de bétail bovin et caprin.
Droit seigneurial à l’origine, il devint ensuite un usage de pacage indivi bénéficiant à tous les particuliers moyennant une redevance annuelle et constituant ce que l’on a désigné par «droit de bandite». Ces droits, après de nombreuses adaptations circonstantielles furent finalement abolis à la période moderne par une loi du Parlement français du 8 juillet 1963.
Après le Rattachement à la France de 1860, et la première explosion économique de la Principauté de Monaco, se développe l'exploitation des carrières de pierres, avec le début de la mutation sociologique des anciennes familles du terroir.
La construction du "Chemin de fer à crémaillère" en 1894, avec l'hôtel du Righi , donnent à la cité une place de choix dans le tourisme hivernal aristocratique de la "Belle époque", à la fin du XIXème siècle et aux premières années du XXème.
Conséquence de l'afflux démographique, en 1904 et 1908, naîtrons les deux villes nouvelles de Beausoleil et de Cap-d'Ail à partir du territoire historique de l'ancienne Turbie.
En 1922, avec le classement en "Station touristique", ce sera pratiquement avec la fin de l'existence paysanne, le début de La Turbie moderne. En effet les troupeaux de brebis et moutons qui chaque années venaient passer les mois de transhumance hivernale sur le terroir, domaine des fameuses bandites ancestrales, n'y seront plus admis.
Et maintenant, à nouveau, avec la deuxième explosion économique de la Principauté de Monaco, nous assistons à la transformation radicale du paysage avec l'extension de l'habitat individuel vers les anciennes campagnes, alliant le calme apprécié de la nature à la proximité de la ville, centre indispensable de l'activité économique.